Février 2024 : 10 jours en Algérie

Alger

 
L'ultime et décisif déclic a eu lieu dans une cabane à sucre quelque part au Canada. J’étais attablée à côté d’une québécoise qui en vient à me poser des questions sur mes origines et comme d’habitude, je réponds de manière laconique : je ne souhaite pas m’attarder sur le sujet car je n’ai rien à en dire. La québécoise me répond avec enthousiasme qu’elle-même est d’origine tunisienne par son père, et à mon étonnement, revient sans cesse sur le sujet. Plus tard à l’extérieur de la cabane nous nous dirigeons vers un homme qui prépare des tires d’érable sur la neige (sortes de délicieuses sucettes au sirop d’érable), et elle me présente de façon théâtrale :
 
- Elsa...la France et l’Algérie ! 
 
Son attitude m’embarrasse, mais ce qui me fait réfléchir surtout, c’est la mienne. En ce temps là, je ne suis pas à l’aise au sujet de l’Algérie car je n’en connais pas grand chose. D’abord, je n’aime même pas cette expression « d’origines », comme s’il était question de fruits et légumes. Je ne suis pas une grappe de tomates cerises provenance non U.E et je trouve le terme réducteur : une identité pour moi, c’est beaucoup plus complexe qu’une « origine ». Je ne suis pas seulement « d’origine algérienne », car je suis moitié-moitié : ma famille paternelle est française, et ma mère est née en France de parents algériens. Quand on parle d’origines, les gens s’imaginent que je ne suis pas une vraie française...et après ils prennent des précautions en préparant les repas : Est-ce qu’Elsa mange de tout ? (c’est à dire : du porc)...oui, ça part d’une bonne intention, mais ça ne colle pas à ma réalité, juste à leurs représentations. Les gens sont curieux et c’est compréhensible, mais je me suis demandée parfois pourquoi ce besoin (parfois très tôt dans une rencontre) de mettre comme une étiquette de provenance sur les personnes ? Ne se disent-ils pas que le sujet viendra naturellement dans la conversation un peu plus tard, que ce n'est pas forcément le point d'intérêt principal d'une rencontre avec un être humain, savoir d'où viennent ses ancêtres ?
 
Dans les ruines romaines de Tipasa, à l'ouest d'Alger
 
En tout cas, je me prends l’allégresse et la fierté tunisienne de cette québécoise en pleine poire. Moi, je ne peux pas partager ça. Et pourquoi ça devrait durer ? Il faut que j’aille en Algérie pour voir de mes yeux ce qu’il en est vraiment, pour cesser d’être ignorante. Les réactions de mon entourage à cette idée me confirment tous les préjugés sur ce pays : seule une collègue de travail m’approuve, sinon, tout le monde tente de me dissuader ou émet des réserves. C’est trop dangereux ! Ce n’est pas le moment ! Pourtant, les conseils aux voyageurs du ministère des affaires étrangères indiquent qu’Alger et Oran sont des destinations sûres. Les réticences des gens ne semblent reposer que sur des éléments flous et subjectifs. Ils projettent les problèmes de la France en Algérie, comme s’il s’agissait de problèmes étrangers plutôt que de ceux de leur propre pays. Quand a eu lieu le dernier attentat à Alger, est-ce que l’une de ces bonnes âmes qui craint pour ma sécurité peut le dire ? C’était sans doute moins récent qu’à Paris...oui oui je sais, ce n’est pas qu’une histoire d’attentat, c’est cette culture entière qui semble rétrograde en France : la condition des femmes, le voile, l’omniprésence de la religion qui à contrario est reléguée à l’intime et au privé en France. Alors, je vais aller vérifier si c’est si terrible que ça. Si l’obscurantisme règne à tous les coins de rue d’Alger, si les femmes sont malheureuses et opprimés, les gens fourbes et dangereux, si l'on va essayer de me marier ou bien de me vendre contre un chameau...etc.  
 
Rencontre avec une mouette algéroise

Je pars pour 10 jours, à Alger puis Oran avec une fille que je ne connais pas, une franco-algérienne dans ma tranche d'âge qui voulait aller en Algérie aussi et a répondu à mon annonce sur un groupe facebook. Contrairement à moi, elle parle un peu arabe, et en plus nous serons hébergés à Alger par les parents d’une de ses amies. Pour obtenir un visa touristique, j’ai fait deux aller-retours à Bordeaux.  
 
La fameuse grande Poste d'Alger
 
Le couple qui nous héberge vient nous chercher à l’aéroport d’Alger. Karim et Akima ont la cinquantaine et deux grands enfants qui ne vivent plus à la maison. Ils parlent un bon français usuel, mais je m’aperçois vite que mon niveau zéro en arabe est quand même embêtant. Je ne peux pas vraiment avoir de conversation aisée et spontanée avec eux. Leur premier langage, celui de leur pensée, c’est l’arabe. De plus je n’ai pas l’habitude d’essayer de me faire comprendre par des étrangers, je me rends compte que j’utilise des expressions, des euphémismes et de l’ironie alors qu’il faudrait que j’adopte un langage standard, plus « scolaire ». Mais comment faire passer ses idées sans utiliser ses propres mots ? Un soir en rentrant je dis à Akima que j’ai un coup de barre, elle ne comprend pas l’expression. Je corrige en disant que je suis fatiguée : elle comprend, mais ce n’est pas vraiment ce que je voulais dire. C’est juste un coup de barre : c’est plus temporaire, moins dramatique et ça sous-entend que la journée a été chargée et intéressante...bon, pas grave. En Algérie les gens sont très protecteurs, prévenants et serviables, et Karim et Akima en sont l'exemple. A la sortie de l’aéroport Karim veut porter mon sac. Akima nous fait à manger matins et soirs, me demande ce que je souhaiterais comme recettes...ce qui est touchant chez ces gens, c'est leur volonté de partager vraiment. Leurs connaissances, leur culture, tout ce qui peut m'aider.
 
Basilique Notre Dame d'Afrique, Alger
 
Le couple décide de nous emmener faire du thé au charbon près d’un lac dans quelques jours. Nous acceptons de modifier notre petit programme en ce sens. Le jour de la sortie, il pleut, il vente, c’est une catastrophe. « Ils ne vont pas nous y emmener avec ce temps quand même... ». Si ! Avec méthode et obstination, Karim conduit dans les virages brumeux des gorges de la Chiffa. « Le paysage est magnifique par temps dégagé ! » Nous dit-il tandis qu’arrivés en haut, nous contemplons une mer de brouillard. Le couple est visiblement déçu, sans doute plus que moi qui trouve cette sortie épique et cocasse. Mais ils ne perdent pas leur humour pour autant : « Il faut imaginer ! » 
Nous croisons des singes mélancoliques et trempés sur un pont : c’est la première fois que je vois des singes en liberté. Nous nous arrêtons et tentons de les appâter avec des bonbons dont ils ne veulent pas. 
 
Au ruisseau des singes, Blida
 
Un soir, Karim se démène pour mettre sur la télé la vidéo du mariage de sa fille, qui est sur une clé usb. Le son ne suit pas, ou bien arrive sans l’image. Finalement, nous parvenons à voir cette fête incroyable de 700 personnes où la mariée porta cinq robes différentes en une soirée. « En France les mariages, c’est plus simple ! » me dit Karim. Ah oui, on peut dire ça. La tenue des femmes est plus sobre qu'en Europe dans la vie quotidienne, mais pendant les mariages, quel faste ! Je vois que certaines invitées aussi changent plusieurs fois de tenue. L'importance donnée a cet évènement est au-delà des mots. D'ailleurs en ville, il y a des boutiques spécialisées dans l'organisation de mariage et autres fêtes qui croulent sous les corbeilles de mariées, décorations et boîtes en papiers de toutes sortes. 

Le thé à la menthe chauffé au charbon chez Akima
 
Parmi les invitées qui dansent il y a des jeunes femmes à la peau claire, et même une jeune fille rousse. Ma compagne de voyage pose une question à son sujet, Akima nous répond qu'elle est kabyle. Avec ma peau mate, mes cheveux et mes yeux bruns, je correspond à peu près au physique typique du Maghreb qu’on a en tête en France. L’ironie, c’est que je fais plus maghrébine que certains algériens qui pourraient passer pour français chez moi. 
 
Dans la casbah
 
Notre guide dans la casbah par exemple, s’appelle Massi, c’est un jeune architecte. Avec sa mine de poupon et ses yeux verts, je le vois aussi bien s’appeler Antoine. Organisé, érudit, il nous parle de la ville en nous montrant à l’appui des photos anciennes sur sa tablette. « Ici les français ont construits un quartier européen sur un cimetière datant de l’époque romaine, là ils ont rasé des mosquées et des maisons pour faire des aménagements... » les propos de Massi sont objectifs, son ton neutre, pourtant j’ai quand même honte pour mon pays. « Alger a construit sa richesse grâce au commerce d’esclaves. Cette place que vous voyez là, c’était celle où on vendait les esclaves. Cervantès a écrit l’histoire de sa capture et de sa captivité à Alger ». Encore une fois revient l’objectivité (dont on pourrait sans doute s’inspirer pour assumer notre propre histoire ?). 
 
La casbah (la vieille ville) est un labyrinthe. Il me faudrait beaucoup de temps pour parler de tout ce que j’ai appris mais je peux au moins mentionner mon émerveillement au Bastion 23, ou palais des Raïs. Cet ensemble de palais de l’époque ottomane très bien conservés me fait comprendre que ce type d’habitation possédait déjà tout le nécessaire bien avant l’arrivée des français, et je suis fascinée par la façon de faire orientale. De l’extérieur, les maisons de la casbah ont l’air de blocs blancs et aveugles. Il n’y a pas de balcons, pas de fenêtres : la maison ici est tournée vers l’intérieur. Et à l’intérieur, quel trésor ! Une organisation autour du patio carré à ciel ouvert, c’est le ciel qui s’invite dans la maison. Les demeures ont leur hammam, leur wc, leur système de canalisations par pièces de terre cuite emboîtées les unes aux autres et leur système d’aération. Je suis surprise de retrouver en quantité dans la cuisine l’ardoise que j’associe à l’Auvergne. Les murs sont couverts de zelliges, des carreaux de faïence colorés qui gardent la fraîcheur. On nous dit que les serviteurs noirs qui vivaient dans ces riches demeures venaient souvent du Mali. 
 
Patio d'un palais d'Alger
 
Massi veut nous faire goûter le keikat en passant devant une boutique : c’est une sorte de biscuit rond très ancien qui évoque un peu le bretzel, léger, et au parfum d’anis. Le pâtissier, apparemment installé dans la rue depuis des lustres, refuse que nous le payions. A la fin de la visite, on essaie le haïk et le djâr, une tenue traditionnelle algéroise : toute une aventure...je comprends aux gestes attentifs et respectueux lorsqu’on m’enrubanne, puis en le portant, qu’il est une sorte d’enveloppe protectrice pour ce qui est précieux. Ce n’est pas l’austère et sinistre voile qui cache et oppresse tel qu’on le perçoit en France. D’ailleurs dans les petites boutiques spécialisées qui étalent leurs articles du sol au plafond, la multitude des formes, des couleurs, des motifs et des textures tend à indiquer que les femmes tiennent à leur voile comme à une coquetterie.
 
Oui c'est moi avec le haïk et le djâr
 
Il y a une occasion en revanche où on me regarde bizarrement...c’est quand je dis spontanément bonjour aux hommes seuls et inconnus que je croise de près, comme par exemple s’il y en a qui sort de l’ascenseur quand je vais y rentrer. Ici la distance entre hommes et femmes n’est pas la même : ce n’est pas nécessaire de saluer chaque homme inconnu qu’on croise dans l’espace public, c’est même plutôt étrange. Il n’y a pas de mépris là-dedans, ils ne nous ignorent pas : ils savent que nous sommes là, nous savons qu’ils sont là et si nous avons besoin d’aide, ils viendront vers nous. Mais si nous n’avons besoin de rien, pas besoin de saluer. Du coup, c’est arrivé deux ou trois fois avant que je ne comprenne pour de bon : je dis bonjour, le monsieur me regarde brièvement comme s’il se demandait ce que je lui veux, ne répond pas et file...
Bon, cette histoire de salut et de distance, ce n'est que mon expérience et je n'en ai parlé à personne. Si ça se trouve, c'est dans ma tête. 
 
Casbah d'Alger
 
Nous visitons donc la casbah, le musée des martyrs (reconstitutions étonnantes de scènes de torture, quasi aucun détail épargné), le musée de l’armée (les panneaux ne sont pas forcément traduits en français et les photos interdites), la grande mosquée d’Alger (troisième mosquée du monde, plus grande d’Afrique et plus haut minaret du monde), le quartier de la grande poste, nous nous promenons sur le bord de mer. Nous faisons une excursion au mausolée royal de Mauritanie, aussi appelé le tombeau de la chrétienne. Il s’agit du monumental et mystérieux tombeau de Sélénée, la fille de Cléopâtre et Marc-Antoine. Il date d’environ 40 avant J-C et je suis stupéfaite d’apprendre que les immenses croix chrétiennes gravées sur les portes ont été ajoutées à posteriori. La manipulation n'a pas d'âge ! 
 
Le tombeau de la chrétienne

Et ses fameuses (fausses) portes ornées de croix de 7 mètres de haut

 
La ville de Cherchell ne me fait pas une forte impression, mais la journée se passe quand même en compagnie d’une jeune guide. Elle rêve de faire ses études au Canada ! Et la France ? Ça ne l’attire pas du tout, elle n'y voit pas d'opportunités pour elle. C’était un peu le même son de cloche chez Massi, qui disait avoir un frère médecin en France qui se sent très seul là-bas. Nous mangeons de l’espadon au restaurant le Dauphin de Tipaza. Quand on se promène en ville, personne ne nous embête. Une femme m’indique que je peux avoir des ennuis si je continue à photographier ce bâtiment administratif qui avait pourtant une jolie façade. La police est plutôt présente. Certains agents postés aux carrefours font la circulation routière au sifflet. J’ai aperçu une femme policière. Concernant la conduite algéroise, elle est un peu chaotique, mais pas pire qu’à Marseille. Les algérois klaxonnent deux fois pour se signaler avant de doubler. Tout ça est finalement plutôt calme. Même si quatre personnes le klaxonnent en tous sens, le chauffeur algérois stationné qui vous attend reste impénétrable. Il n’y a pas de ceinture à l’arrière et on perd vite l’habitude de la mettre. 
 
 
Toujours dans la casbah
 
Heetch et Yassir sont les applications algériennes équivalentes à Uber, qui permettent de trouver un chauffeur rapidement, facilement et à prix abordable. Nous nous en sommes beaucoup servi. Comme je ne parle pas arabe c'est surtout ma collègue qui échange avec eux. Nous nous asseyons à l'arrière, moi sur la droite. Même si je ne cause pas, je vois donc toujours une partie du visage des conducteurs, ses mains et la route. À Alger les chauffeur heetch, c'est plutôt quelque chose de formel, sérieux. Les chauffeurs ne discutent pas, ne mettent pas de musique et font tranquillement leur job. À Oran, c’est une autre histoire. 
 
La gare d'Oran
 
Les chauffeurs ont souvent la vingtaine ou la trentaine, mettent régulièrement leur musique favorite au bout de quelques secondes de trajet (style et volume variable : raï remixé, Adèle, techno...), discutent plus facilement, ont le volant dans une main et le téléphone dans l'autre en grillant tranquillement les feux rouges. En dix minutes, un quart d'heure ou une heure, finalement c'est une rencontre : on est avec quelqu'un dont on a besoin et qui va plus ou moins nous marquer avec sa façon de parler, ses gestes, ses petites histoires ou son silence. Il y a celui que nous avons trouvé deux fois, la trentaine, pantalon noir, mains fines, et qui à la fin du deuxième trajet nous a dit à la prochaine avec un sourire rayonnant (évidemment à partir de là nous ne le reverrons jamais, c'est la loi de ces rencontres de voyage furtives, et je le sais déjà au moment où je lui réponds oui). Celui qui avait des cheveux noirs presque longs (ça n’existe quasiment pas ici), mains fines aussi, une montre dorée, et qui nous a mis des musiques mélancoliques qui m'ont foutu le cafard tout en s'aspergeant de parfum. Il y a le petit, châtain, petites mains, fort accent oranais que même moi je pouvais percevoir, qui de fil en aiguille nous a monté et redescendu de Santa Cruz et nous a attendu pendant nos visites. Il y a le Lyonnais d'Oran bien sûr ! « Moi j'ai été 7 ans à Lyon, j'ai deux gamins là-bas. Mais j'ai fait une grosse bêtise. Bon, on est arrivés sur la place d'armes. Alors la place ok, mais vous allez pas dans cette rue là, car il y a des petits voleurs. » Puis celui qui était francophone et parlait très bien français, et nous a expliqué que sa famille venait de Mosta (Mostaganem), où les gens étaient plutôt francophones, et que c'était une jolie ville qu'il fallait aller visiter. Pour conclure sur les différences entre heetch à Alger et heetch à Oran, je dois dire qu'à Alger nous sommes tombés deux fois sur des épaves et que ce n'est pas arrivé à Oran : peugeot 206 à travers laquelle on voit le jour par les joints des portes arrière, légère comme une canette de coca, rafistolée au gros scotch marron...ou même au petit scotch transparent. 
 
Miam !
 
 
Les plats que j’ai découvert s’appellent le tlitli, les bourreck, les soupes kbeb et chorba, la rechta, la karantika, frite-omelette…il n’y a pas de dessert à la fin des repas en dehors de quelques dattes ou des fraises. Au restaurant aussi, rien de plus sophistiqué qu'un flan ou une orange. C'est une habitude qu'on prend rapidement et qui fait du bien (et qu’on perd aussi rapidement en revenant en France). À la maison, les biscuits sont servis plutôt le matin ou avec le thé dans l'après-midi, mais pas en fin de repas. Akima passe beaucoup de temps à cuisiner et fait même sa limonade, que j’adore. Les petites épiceries qui restent ouvertes tard le soir sont juste en bas de la rue : je n’ose pas prendre de photos mais les montagnes d’épices qu’on y trouve en auraient valu la peine. Je suis assez perdue avec les dinars au début. Il y a des pièces de 5, 10, 20, 50, 100, 200. Des billets de 500, 1000, 2000...plusieurs types de billets de 2000 circulent en même temps (les anciens et les nouveaux, dont les couleurs sont différentes). Personne n'utilise la carte bancaire, tout se fait en espèces. Et enfin, les gens parlent souvent en « anciens franc » comme font nos grands parents français, c’est-à-dire disent 18000 dinars pour dire 180 dinars. Tout est beaucoup moins cher qu’en France...un repas sur le pouce dans une pâtisserie d’Oran, petite pizza, petit burger et flanc : 300 dinars, environ 2 euros.  
 
Chapelle de Santa Cruz à Oran (Wahran)
 
La découverte d’Oran me fait un choc culturel : c’est une ville éclectique pleine de monde et de poussière où nous passons tout de suite pour des touristes. Nous sommes à l’hôtel et n’avons plus la famille en point de repère rassurant. C’est justement dans cet hôtel que je fais la rencontre fortuite du cafard oranais. Le cafard oranais est d’une taille impressionnante, mais beaucoup plus conciliant que son cousin français qui court comme un guépard, il se laisse abattre sans faire trop de difficultés. 
 
La cathédrale du Sacré-cœur d'Oran, transformée en bibliothèque
 
Nous faisons un tour au marché Mdina Jdina, emblématique d’Oran, où je vois des citrons gros comme des patates. Je n’ose pas acheter les énormes olives rouges qui me font envie du fait que je ne peux pas m’exprimer correctement. Déjà que je ne suis pas loquace dans ma langue natale...nous prenons en photo la grande synagogue d’Oran, où un vieil homme nous invective en arabe (peut-être mécontent que nous portions de l’intérêt à un monument juif en pleine guerre israélo-palestinienne, je ne sais pas, je ne comprends rien de son charabia). Nous visitons l’arène d’Oran, la seule d’Afrique, monument qui possède une histoire riche et étonnante. Le responsable nous fait une visite guidée passionnée, nous accompagne pour acheter notre repas et nous fait monter dans le bon bus pour repartir. Dans le bus, c’est un homme accompagnant le conducteur qui passe parmi les passagers pour récolter la monnaie et indiquer aux gens qu’ils sont arrivés. Nous passons par l’inévitable fort et chapelle Santa Cruz. La cathédrale du sacré cœur a été transformée en bibliothèque. Non loin de là nous passons du temps dans la boutique d’un bouquiniste qui nous met ses meilleures cassettes de raï. Tout le monde s’inquiète pour nous et nous met en garde contre « les petits voleurs » et les « voyous » mais finalement, on se demande où ils sont ces fameux bandits, car on ne voit que les gens qui en parlent. Bon, je ne dis pas que c’est un monde parfait et formidable, c’est simplement mon expérience personnelle.  
 
Oran vers le départ du téléphérique
 
Par une vue de l'esprit paranoïaque, certains en France s'inquiétaient que les algériens m’en veuillent particulièrement en tant que française. En réalité, je suis loin de passer pour l'ennemi colonisateur, si bien qu’on s’adresse à moi en arabe. Cette crainte vient à mon avis du fait que les français s'imaginent les gens d'Algérie très différents d'eux. À Alger, non, je ne suis pas une européenne parmi des peuplades exotiques...Une femme en pantalon et sans voile ne détonne pas tellement, je passe pour locale. 
 
A Alger près de la Grande Poste.

De toute façon, les algériens semblent contents que des visiteurs français viennent découvrir leur pays. « Soyez les bienvenues ! » nous disent les chauffeurs de taxi avec qui nous parlons, les employés des musées ou des parcs. Les gens sont simples, spontanés, partagent facilement leurs connaissances. Je comprends que les craintes sur ces barbares d’arabes sont à côté de la plaque, et que ça nous arrange bien de penser que le mode de vie étranger est arriérée pour justifier plus facilement du notre, qui repose sur des valeurs opposées. La famille et la religion sont tout là-bas, quand nous privilégions la liberté avant tout en France.  
 
Seffa : le dernier plat d'Akima avant notre départ, semoule sucrée à la cannelle et aux fruits secs
 
En partant je suis heureuse de retrouver mon pays où la vie est tellement plus facile : plus de liberté, plus de confort, une température plus clémente, la verdure luxuriante du Lot, une douceur de vivre incomparable. Certes, s’en est fini des pâtisseries orientales à 60 centimes et des déplacement illimités avec chauffeur. Fini Karim et Akima qui veillent sur moi, les plats maison tous les jours, l’aventure et l’inconnu à chaque coin de rue. Mais quel soulagement tout de même de retrouver son chez soi. Un mois plus tard cependant, je sais déjà que je retournerai en Algérie : je veux voir le désert et aller plus loin dans la découverte de ce grand pays...

 
 




Partie Pratique 
Quelques mots appris sur le tas !

 
Kifech n'goulou... : comment on dit...
Wech aenara : qu'est ce que ça veut dire
Wech rak : comment tu vas ?
Wech keyn : qu'est ce qu'il y a ?
Wasmek : comment tu t'appelles ?
Labess : ça va ?
Salam aleykoum - aleykoum salam : formules de salutation
Inchallah : ainsi soit-il (formule utilisée au quotidien comme nous utiliserions une formule de politesse)
Hamdoullah : merci seigneur (idem)

Saha : merci
Wein : où ?
Chral : combien ?

Zarma : genre
Woa : oui
La : non
Bézeff : beaucoup
Kif kif : pareil/égal
Tôt : bekri


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